En 1991, la Société d’histoire à Laval installa 15 panneaux d’interprétation près des croix de chemin. L’un d’eux, un lutrin, permettait aux passants de connaître l’histoire de cette croix qui fut longtemps la doyenne de ces lieux de prière à Laval. Elle porte encore aujourd’hui sur son poteau, en-dessous de la gloire centrale, le millésime 1851. On pouvait lire sur le panneau cette pensée, en épigraphe : « Je comprends à présent cette croix des ancêtres, dont la voix renferme des notes lointaines, où s’harmonisent en chantant les mille vois éternelles de ceux qui ne sont plus. »
Oui, elle semble immortelle…Les ancêtres parlent à travers elle. L’artisan de cette belle œuvre rustique de 1851 nous demeure inconnu. Entièrement refaite en 2001 grâce à Madame Louise Lemieux, petite-fille de Lambert Paquette, elle a gardé grâce à elle, tout son charme exquis : extraordinaire faisceau de 12 longs rayons courbés autour du Sacré-Cœur central, une niche à deux étages fixé au poteau de la croix avecimage du Sacré-Cœur en haut et statuette de l’Enfant-Jésus de Prague en bas, croix de fer noire au sommet, extrémités polygonales…

Croix Paquette a son ancien emplacement – Photo prise en 1991
Revenons à notre panneau. Ses angles étaient décorés du Cœur enflammé de Jésus prolongé en bordure par un motif en alternance figurant des rayons de part et d’autre du poteau de la croix. La prière tirée d’un cantique de saint Louis-Marie de Montfort parle de la croix en ces termes : « La croix est un mystère très profond ici-bas… Dieu n’a pu se défendre de sa rare beauté, la croix l’a fait descendre en notre humanité… On va dans la patrie par le chemin des croix, c’est le chemin de vie, c’est le chemin des rois. Cette croix dispersée sur terre en tant de lieux, sera ressuscitée et transportée aux cieux.
Ces mots en effet semblaient choisis pour parler de cette croix : rare beauté, chemin de vie, croix dispersée en tant de lieux… comme nos croix de chemin de Laval, au nombre de 27. Même le « chemin des rois » n’est pas sans évoquer le chemin du roi qui correspond, à Laval, au boulevard Lévesque où s’est toujours trouvée la croix Paquette jusqu’à son déplacement récent près de l’église Saint-Noël-Chabanel. Localisée sur la terre des Gravel où passe la rue Lambert, elle marquait autrefois la limite de la paroisse Saint-François de Sales. E.-Z. Massicotte la photographia en 1922, comme le montre aussi le panneau explicatif. Elle fut transportée en 1950 sur le côté sud du boulevard Lévesque non loin de la rue Mirelle par M. Lambert Paquette. Sa fille, Madame Muguette Paquette-Beaulne, la recouvra ensuite avec des panneaux de bois. Elle tenait tant à sa précieuse croix familiale ! Curieux témoignage des années 1990 : une résidente d’en face lui avait dit que cette croix lui portait malchance, alors que manifestement ce n’était pas l’avis de Muguette. Chaque hiver, elle enveloppait le panneau, pourtant en matériau fort résistant, pour le protéger des intempéries !
Venons-en maintenant à la génération suivante. La fille de Madame Paquette, Louise Lemieux, refit, comme nous l’avons dit plus haut, la croix semblable à l’originale. En 2013, M. Roger Lemieux, époux de Louise, façonna une gloire rayonnante plus conforme à celle de 1851. À cette occasion, Madame Lemieux commanda un nouveau panneau presque identique à celui de 1991 en ajoutant les informations récentes au sujet de la croix. Mais la maison fut mise en vente à la suite du décès Madame Paquette. Pour garantir sa préservation, Madame Lemieux décida de donner la croix ainsi que le panneau à la paroisse Saint-Noël-Chabanel en 2015. Quand on sort de l’école Fleur-Soleil par la rue de l’Église, on ne peut pas la manquer.
Que la croix Paquette aide les générations futures à retrouver le sens de la Croix. Oui, vraiment, elle serait encore plus ainsi une manière d’immortalité.
Benoit Caron, novembre 2016